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#inspiration - De l'espoir



Pour écouter sur la plateforme de votre choix : https://linktr.ee/sismique


Cet épisode fait suite à l’épisode dans lequel je partageais avec vous mes peurs, mes 9 peurs. Et donc comme promis, je vous propose une réflexion sur comment essayer de dépasser ses peurs, ou au moins de vivre avec.

Mais d’abord je voudrais revenir brièvement sur l’angoisse et les peurs évoquées parce que vous êtes nombreux à m’avoir fait un retour sur cet épisode en me disant notamment que ça vous avez fait du bien de m’entendre en parler. Souvent parce que ce sont des émotions que vous partagez (quand je dis vous, je m’adresse à celles et ceux qui m’ont écrit) et parce que c’est utile de mettre des mots dessus.

Je voudrais y revenir donc pour préciser que selon moi, il est tout à fait normal de s’inquiéter de la situation du monde , et je constate même que tous les gens bien informés que je rencontre sont inquiets.

Ne pas l’être à l’heure actuel, c’est soit être mal informé, soit mettre tout ça sous le tapis, faire tout pour se dissocier, pour couper l’empathie, voire les émotions en général.

Honnêtement, il me semble pour être totalement positif et optimiste dans le contexte actuel, il faut vraiment faire preuve soit ignorance soit d’une grande volonté, ce type de volonté à laquelle Gramsci fait allusion dans sa formule : “pessimisme de la raison, optimise de la volonté”. Ceci étant, s’inquiêter pour l’avenir du monde, ça ne veut pas forcément dire être condamné à vivre dans l’angoisse permanente, ou la tristesse. Et c’est là un défi que connaissent bien tous les anxieux ou même ceux qui vivent de véritables difficultés au présent voire des drames : comment ne pas perdre pied, comment ne pas déprimer même quand tout semble aller mal ? C’est une question qui en tout cas personnellement me tracasse pas mal alors même quand dans les faits pour moi tout va bien. Est-ce que je mets un gros couvercle sur mes peurs, est-ce que les entère, et sinon, qu’est-ce que j’en fais ?

Je voudrais aussi ajouter que la peur ou l’angoisse ne sont pas absurdes d’une manière générale, que se sont même des émotions inévitables.

Pour un philosophe comme Heidegger, elles sont ce qui distingues les humains des autres êtres vivants, avec une nuance à préciser entre la peur et l’angoisse qu’il peut être utile d’avoir en tête.

La peur, selon Heidegger, est toujours liée à quelque chose de spécifique : on a peur de quelque chose en particulier. C'est un sentiment directionnel qui peut souvent être rationalisé ou expliqué. La peur a un objet concret et identifiable, comme une situation ou une chose particulière qui la provoque.

L'angoisse, en revanche, est plus diffuse et n'a pas d'objet direct ou identifiable. C’est une émotion qui surgit de la confrontation avec le "néant" et l’impossibilité de donner un sens clair et défini à notre existence. “ L'angoisse est la disposition fondamentale qui nous place face au néant.” nous dit-il

Elle est liée à la prise de conscience de la finitude de notre être et à la mort inévitable qui est notre horizon commun. C'est une réalisation de l'absurdité et du non-sens potentiel de la vie qui suscite cette angoisse existentielle.

L'angoisse, pour Heidegger, joue un rôle crucial dans la réalisation de ce qu’il appelle l'authenticité. C'est quand on fait l’expérience que l'individu est jeté de retour sur lui-même et est confronté à sa propre liberté et responsabilité de donner un sens à son existence.

La rencontre avec l'angoisse, loin d'être simplement négative donc, ouvre la possibilité de vivre de manière authentique, car elle révèle notre être-pour-la-mort et donc la singularité et l'unicité de notre propre existence.

Voilà pour Heidegger. Ca n’est pas super simple, mais je voulais poser ça là pour dire en gros n’ayons pas peur d’avoir peur ou d’être angoissé, rien de plus normal, on peut presque le voir comme le propre de l’homme en quelque sorte.

Mais passons au thème central de cet épisode, à savoir la notion d’espoir.

L'espoir et la peur sont souvent envisagés comme des émotions ou des états d'esprit antithétiques, en ce sens qu'ils projettent tous deux notre esprit dans l'avenir, mais avec des attentes divergentes.

La peur nous alerte sur les dangers potentiels et nous prépare à y faire face, alors que l'espoir nous offre une perspective plus lumineuse, un futur dans lequel nos aspirations et nos désirs peuvent se réaliser.

La peur peut souvent surgir en réponse à l’incertitude ou à une perception de menace, qu'elle soit tangible ou psychologique.

L'espoir, lui, pourrait être perçu comme une sorte de baume, une manière de naviguer à travers cette peur sans être submergé. Donc en ce sens, l’espoir peut certainement être une réponse à la peur, offrant une voie vers l'avant, une motivation pour engager l'action même dans des moments de doute ou de danger.

Par exemple, dans une situation de crise ou de bouleversement, la peur peut initialement mobiliser notre attention et nos ressources pour faire face à la menace, mais c'est l'espoir qui souvent nous pousse à aller de l’avant, à planifier, à collaborer et à imaginer des solutions. L’espoir fournit un contexte au sein duquel les défis suscités par la peur peuvent être abordés de manière constructive.

Mais, l’interaction entre espoir et peur est complexe et multidimensionnelle. Tandis que l’espoir peut atténuer la peur, il est aussi possible que ces deux sentiments coexistent, nous guidant à travers des chemins de prévoyance et d'optimisme pragmatique.

L’espoir, s'il est dénué de naïveté, reconnaît la légitimité de la peur mais propose un récit alternatif où le changement positif est possible.

Et donc tandis que la peur souligne ce qui peut être perdu, l’espoir pointe vers ce qui peut encore être sauvé ou gagné. En cela, l’espoir n'efface pas la peur, mais lui offre un contrepoids, équilibrant nos perspectives et actions vers un futur où la lumière peut encore percer même à travers les nuages les plus sombres.

Je vous l’accorde c’est un peu théorique tout ça, mais encore une fois, mon but est de partager des clés de lecture que personnellement je trouve intéressante et à vous de voir ce que vous en faites.

Donc plutot que de vous dire de but en blanc ce qui me donne espoir aujourd’hui dans le monde, ce qui me laisserait penser que ces peurs évoquées ne se matérialiseront pas, je préfère d’abord poser un cadre théorique donc, parce qu’en fait ce sont des questions que les humains se posent depuis toujours et que ce serait dommage de ne pas aller regarder comment diverses personnes ont tenté d’y répondre.

Pour le coup j’ai du pas mal réfléchir au sujet de l’espoir lors de l’écriture de mon livre, parce que je manière classique, les lecteurs attendent que l’on conclut par une note d’espoir. Il faut en général qu’il y ait une sorte d’ouverture positive en cloture d’un essaie. Soit ça finit bien, soit il faut qu’on nous laisse avec la possibilité d’une fin heureuse. Sinon, ça s’appelle un drame. Donc pour satisfaire les lecteurs on va à la fin proposer des solutions au problème exposé

Alors je ne vais pas vous lire la dernière partie de mon livre, qui précisément donc traite de la question de quoi faire de ce constat plombant sur le monde présent à venir, de ce diagnostic qui est à l’origine de ces peurs. Mais je vais tout de même partager des pistes de reflexions et surtout des références utiles pour prendre du recul sur notre époque et notre présent.

Commençons pas les grecques anciens et par l’ami Prométhée puisque donc il offre une entrée en matière intéressante et qu’il a au passage été évoqué par Aurélien Barrau dans l’épisode précédent comme étant structurant pour notre civilisation

Prométhée est un Titan qui est réputé pour avoir dérobé le feu aux dieux pour le donner aux humains, symbolisant ainsi le don de la connaissance, de la technologie et de la civilisation. Ce geste a été vu comme un acte d’espoir pour l'humanité, offrant les outils nécessaires pour progresser, créer, et améliorer sa condition.

Un autre élément du mythe, peut-être moins connu mais profondément lié à l'espoir, est le mythe de Pandore. Prométhée est souvent lié à la création de l’homme, et selon certaines versions, c'est également lui qui crée Pandore, la première femme, par la volonté de Zeus. Zeus offrit à Pandore une boîte (ou jarre) avec l'injonction de ne jamais l'ouvrir. Curieuse, Pandore ouvre néanmoins la boîte, libérant tous les maux de l'humanité - maladie, mort et toutes sortes de misères. Cependant, un élément reste au fond de la boîte : l’espoir.

Il est intéressant de noter que l’espoir est contenu avec tous les maux et misères dans la boîte de Pandore. Les interprétations de ce fait varient : certains voient l’espoir comme une forme de bienveillance divine, offrant aux humains une consolation face aux maux du monde. D'autres, peut-être de manière plus cynique, voient l’espoir comme un autre mal, prolongeant indûment la souffrance humaine en entretenant une attente qui pourrait ne jamais être satisfaite.

L’espoir dans le mythe de Prométhée et de Pandore peut donc être vu comme double. D'une part, il symbolise la possibilité de progrès et d'amélioration grâce au feu (la connaissance et la technologie) apporté par Prométhée. D'autre part, dans le mythe de Pandore, l’espoir peut être vu à la fois comme un doux remède face aux calamités de l'existence et potentiellement comme un piège qui nous maintient dans une attente perpétuelle et inassouvie.

Ces mythes ouvrent une fenêtre sur la complexité de la notion d'espoir dans la pensée grecque antique, reflétant une reconnaissance de son pouvoir salvateur mais aussi de sa capacité à potentiellement tromper ou décevoir.

La philosophie grecque antique, avec des penseurs comme Socrate, Platon et Aristote, offre également des réflexions sur l'espoir, le désir, et la quête du "bonheur" ou "bien-être". Ces philosophes exploraient la manière dont l'espoir pouvait guider les actions humaines et comment les vertus, la raison, et l'éthique pouvaient façonner un mode de vie épanouissant.

Pour les Stoïciens, par exemple, la paix intérieure (ou ataraxie) était centrale, et celle-ci pouvait être atteinte en vivant en accord avec la nature et en acceptant ce qui échappe à notre contrôle. L’espoir, dans ce contexte, n’est pas nécessairement orienté vers le changement des circonstances extérieures, mais plutôt vers la capacité à maintenir une constance et une sérénité intérieures, même face à l'adversité.

« Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé et le courage de changer ce qui peut l’être, mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre » - Marc Aurèle

On comprend au travers de cette citation de Marc-Aurèle ,l’empereur romain philosophe que le travail est d’abord de ne pas se tromper de se sujet, de ne pas placer l’espoir au mauvais endroit et notamment dans des choses sur lesquels on n’a pas prise. Si on ne peut rien faire par rapport à une situation, il s’agit de l’accepter de faire avec, pas d’espérer la changer.

D’une manière général chez les philosophes antiques, l’espoir n’est pas envisagé de manière naïve ou irréfléchie. Ils étaient pleinement conscients des limites et des dangers potentiels d’un espoir non examiné, d’un faux espoir.

La recherche de la sagesse, pour eux, impliquait une gestion prudente et réfléchie de l'espoir, le plaçant dans le cadre d'une vie vertueuse et éthique.

Donc l’espoir est à la fois une source de réconfort et un objet de scrupuleuse attention philosophique. Cela nous parle de la dualité de l’espoir – un aspect essentiel de l’expérience humaine qui peut à la fois soulager la souffrance et, si mal dirigé, potentiellement la prolonger.

Je voudrais vous parler un peu de Spinoza qui a au 17e siècle apporté une perspective fascinante sur les émotions humaines dans son œuvre "l’Éthique". Il voyait les émotions, et en particulier la peur et l'espoir, non pas simplement comme des états passifs, mais plutôt comme des phénomènes dynamiques et influents, qui sont étroitement liés à notre perception de l'avenir et aux attentes qui en découlent.

Pour Spinoza, l'espoir et la peur sont tous deux issus d'une incertitude concernant le futur, mais ils se distinguent par la nature de l'attente :

  • L’espoir est une joie inconstante, née de l'image d'une chose future ou passée, dont l'issue nous est incertaine.

  • La peur, à l'inverse, est une tristesse inconstante, aussi découlant de quelque chose dont l'issue est incertaine.

Cela nous montre une particularité dans sa pensée : la joie et la tristesse (ou le plaisir et la douleur, selon certaines traductions) sont des émotions centrales, et d'autres sentiments comme l'espoir et la peur sont dérivés de celles-ci, tout en étant liés à notre projection dans le futur et à notre estimation de la probabilité des événements à venir.

L'intéressant dans l'approche de Spinoza est sa rationalité concernant ces émotions. Bien qu'il reconnaisse la peur et l'espoir comme étant intrinsèques à la condition humaine, il ne les voit pas comme des guides fiables pour le comportement moral ou éthique. En effet, il argumente que pour vivre une vie vertueuse et épanouissante, il est essentiel de comprendre nos émotions, et où possible, de les guider par la raison. Et il est essentiel en particulier de reconnaitre la manière dont ces emotions peuvent être déclenchées et influencées par des facteurs externes (comme d'autres personnes ou des événements imprévus), pour gagner une meilleure maîtrise de nous-mêmes et vivre de manière plus libre et autonome.

Puisque in fine, c’est souvent de ça dont il devrait s’agir, comment faire des choix libres ? Comment vivre une vie éthique, joyeuse, pleine, quelles que soit les circonstances extérieures ?

Et ca m’amène à parler de Camus pour qui la liberté passe par la prise de conscience de l’absurdité du monde.

Camus est critique envers l’espoir qu’il voit comme une forme de résignation. Pour déveopper sa pensée il explore notamment en profondeur le mythe de Sisyphe.

Sisyphe, dans la mythologie grecque est condamné par les dieux à rouler éternellement un rocher jusqu'au sommet d'une montagne, seulement pour le voir retomber chaque fois qu'il atteint le sommet. Camus y voit un symbole de la condition humaine et de la lutte absurde contre l'inéluctabilité de la mort. Il nous dit “"Il faut imaginer Sisyphe heureux”. Pourquoi ? Parce que Sisyphe, bien conscient de la futilité de son entreprise, continue néanmoins. Dans sa révolte, sa passion, et son acceptation de sa condition sans espoir de transcendance ou de salut, Sisyphe devient un héros.

L'espoir, dans ce contexte, est présenté comme un moyen par lequel les gens évitent souvent de faire face à l'absurde de leur condition. En espérant un au-delà ou un sens caché, ils éludent la confrontation directe avec la réalité absurde de leur existence. Sisyphe, en embrassant sa tâche sans espoir, incarne une liberté tragique et une intégrité morale aux yeux de Camus.

Pour lui, l'absurde c’est de la confrontation entre notre désir humain de sens et d'ordre et l'indifférence chaotique de l'univers. On veut que notre vie ait un sens, que le monde, que l’histoire ait un sens, et pourtant l'univers ne nous en offre pas intrinsèquement. Et sa conclusion est qu’il est essentiel de maintenir une conscience constante de l'absurde, de la revendiquer et de vivre en harmonie avec elle pour mener une vie authentique. C’est dans cette révolte constante et cette confrontation avec l'absurde que l’on trouve une vie riche et une liberté ultime, même si elle est dénuée de sens ultime ou de salut transcendant.

Alors évidemment cette posture existentialiste, voire “absurdiste", est extrêmement difficile à tenir.

Parce que intuitivement on se dit qu’on a forcément besoin d’espoir. Quand on est plongé dans le noir, dans le doute, quand on a peur, on se dit que si on ne voit pas de lumière au bout du tunnel, si on ne peut pas imaginer qu’il y a un bout du tunnel alors à quoi bon ?

Et c’est bien pour ça que l’espoir est si central dans toutes les religions.

Chez les chrétiens, il y a ce qu’on appelle les trois vertus théologales qui sont la foi, l'espoir et la charité. L'espoir, dans ce contexte, n'est pas simplement un souhait optimiste pour l'avenir, mais un des pilier, une confiance profonde et assurée dans les promesses de Dieu et en la vie éternelle.

Les chrétiens sont appelés à vivre dans l'espoir, en dépit des difficultés et des souffrances du monde présent. Cette perspective est sous-tendue par une compréhension de la souveraineté et de la fidélité de Dieu, qui, croient-ils, est en contrôle ultime de l'univers et fidèle à Ses promesses. C'est également une force qui permet aux croyants de persévérer dans la foi et de maintenir leur intégrité et leur amour dans des circonstances parfois très adverses.

L'espoir joue également un rôle crucial dans la tradition juive, enraciné dans les récits, les prières et les rituels de la communauté. Au cœur de cette espérance, on trouve souvent un espoir messianique – l'attente de l'arrivée du Messie qui apportera la paix et la justice, et rassemblera tous les Juifs en Terre Sainte. L'espoir, dans la pensée juive, est souvent lié à l'idée de réparation , qui signifie réparer ou guérir le monde. C'est un appel à l'action, un impératif de travailler pour la justice sociale, la paix et la guérison là où il y a cassure et souffrance.

L'histoire juive elle-même est riche de moments où l'espoir a été un pilier central. La sortie d'Égypte, l'exil babylonien, et bien sûr, les horreurs de l'Holocauste – ces moments de profonde désolation et de souffrance ont été traversés avec un regard tourné vers l'espoir d'une réalité meilleure et d'une rédemption future. Les récits et les psaumes bibliques reflètent souvent cette dynamique, avec des lamentations profondes et des moments de désespoir, mais aussi une espérance inébranlable en la fidélité et la délivrance de Dieu.

Idem chez les musulmans. L'espoir, ou "Raja" en arabe, occupe également une place significative dans l'Islam. Pour les musulmans, l’espoir est intimement lié à la foi en Allah et à la confiance en Sa miséricorde et en Sa grâce.

Dans les tradition orientales c’est un peu différent.

Dans le bouddhisme, la notion de l'espoir peut être envisagée à travers le prisme de la compréhension de la souffrance (Dukkha) et de la libération de celle-ci. L’espoir, dans ce contexte, pourrait parfois être perçu comme une attache ou un désir qui pourrait potentiellement mener à plus de souffrance s’il n’est pas réalisé.

Au lieu de placer l'espoir dans les résultats ou dans les attentes futures, le bouddhisme encourage plutôt à vivre de manière éthique et à pratiquer la méditation et la sagesse dans le moment présent.

Cependant, cela ne signifie pas que le bouddhisme est dénué de toute forme d'optimisme ou d’espoir. Au contraire, la possibilité d'atteindre le Nirvana ou l'Éveil offre un chemin et une direction qui inspirent le pratiquant à persévérer malgré les défis et les souffrances de la vie.

La Bhagavad-Gita, texte sacré de l'hindouisme, explore divers aspects de la vie, du devoir, et de la spiritualité, et l’espoir y trouve une place particulière,

L’espoir, pourrait être vu comme un détachement des résultats spécifiques et une confiance dans l'ordre cosmique et la justice du Dharma. L’espoir réside dans la conviction que, malgré les apparences extérieures, il y a une justice et un ordre universels qui soutiennent les actions justes et éthiques.

« Agis sans te préoccuper du résultat de ton action. »

C’est un peu pareil dans le Taoisme, comme ça on aura fait le tour, l’espoir, pour les adeptes du TAO se traduit moins par une aspiration ou une attente précise et plus par un lâcher-prise, une foi en la voie naturelle des choses et une acceptation tranquille de ce qui vient. C'est un espoir qui est ancré non pas dans le futur, mais dans une confiance dans le processus de la vie elle-même. Personnellement je trouve que cette perspective offre une alternative intéressante et rafraîchissante à d'autres vues occidentales et orientales, puisqu’elle ouvre peut-être une voie médiane entre l’attente active et l’acceptation passive.

Voilà donc pour le petit tour d’horizon du sujet et évidemment je suis très loins d’être spécialiste de tout ceci et si je n’ai pas été suffisamment précis, ne m’en voulez pas. Mais au moins vous ne pourrez pas dire que je n’ai pas bossé pour cet épisode.

Mais alors qu’est-ce qu’on fait de tout ça dans le contexte actuel ?

Alors ne vous attendez pas à ce que je vous apporte une réponse qui vous convienne, je cherche déjà pour moi-même et surtout je ne sais pas où vous en êtes, de quoi vous avez besoin, ce que vous pouvez vous permettre de faire ou ne pas faire.

Certains d’entre vous ont absolument besoin de trouver du sens à tout ce qui nous arrive, d’autres ont la foi et ont déjà trouvé un sens, d’autres encore, sont dans l’acceptation Zen de ce qui est, etc…

Je sais aussi, que beaucoup attendent des réponses très concrète et que cette approche très philosophique ne convient pas à tout le monde. Pour certains tout ceci n’est que du blabla, on a besoin de concrets, de pistes d’actions et que ce n’est que là que l’espoir réside. Encore une fois, chacun son système.

Et je comprends tout à fait qu’il soit difficile de se contenter de théoriser l’espoir ou de s’appuyer sur ces concepts que j’ai présenté rapidement. Devenir sage c’est le travail d’une vie, ça demande énormément de temps et de travail sur soi et donc on a surtout envie de trouver de vrais sources d’espérances extérieures à nous-même.

Concrètement, quand on évoque des peurs liées à la marche du monde comme je l’ai fait, ce qu’on attend pour des dépasser, pour ne plus avoir peur, c’est d’imaginer un plan pour échapper aux catastrophes. Et ca peut vouloir dire 2 choses:

  • avoir un espoir lié au fait que l’on va éviter la catastrophe. Par exemple, pourquoi certains étaient content après les accords de Paris sur le climat, c’est qu’on pouvait se dire que ça y est on allait se mobiliser pour rester sous le 1,5 degres et donc ça allait le faire.

  • Mais on ça peut aussi vouloir dire, espérer traverser les évènements sans trop souffrir, voir pourquoi pas, en parvenant à être positif ou joyeux alors même que ce qui nous faisait peur se matérialise, arrive.

Parce qu’in fine, ce qui nous fait vraiment peur c’est de souffrir, ou alors de mourir, pour reprendre la thèse d’heidegger. C’est de souffrir physiquement mais aussi emotionnellement, à cause de la perte de lien avec celles et ceux qu’on aime, et avec tout ce qu’on aime, ce qui compte pour nous. Ca peut être la liberté, le confort, la justice, nos proches, la paix… A chacun son truc.

Je note que face à ce qui nous menace et donc nous fait peur, on adopte souvent une réthorique guerrière. On doit lutter contre le réchauffement climatique, on a fait la guerre au vivant… et on designe des adversaires, qui parfois deviennent des ennemies même. On a besoin de désigner un camp d’en face et de le combattre. C’est eux contre nous, nous étant évidemment du bon côté puisque personne ne se dit qu’il est le méchant. J’ai toujours trouvé ça étrange cette idéee que Dark Vador prenait plaisir à se dire qu’il était du côté obscur de la force. Qui voudrait ça ? Mais je m’égare

On fait ça pour mobiliser évidemment, mais aussi parce que précisément parler de lutte, d’une guerre, c’est parler d’espoir. C’est pouvoir imaginer qu’à la fin on va gagner.

Il est assez courant quand je donne une conférence par exemple d’avoir à la fin une personne plutot agée dans le public qui évoque la seconde guerre mondiale. Et qui me dit : nous on a vécu la guerre, on pensait que c’était perdu, et on a résisté. Sous-entendu, ne perdez pas espoir, et battez-vous contre l’ennemie.

Mais qui est l’ennemie dans la polycrise actuelle. C’est tout même beaucoup plus compliqué. Où faut’il envoyer des bombes ? Où sont les grands méchants ?

Alors chacun aura une idée là-dessus, mais ce que j’observe c’est que précisément, il n’y a pas d’ennemie , ou plutôt c’est le système dans son ensemble. Et le système c’est tout de même très vague. C’est quoi ? Le capitalisme ? La civilisation ? L’occident ? Les ultra-riches ? Poutine ? Les Chinois, les américain, l’UE ? Total ?

Evidemment qu’il y a des personnes qui font du mal, que ce soit volontaire ou non d’ailleurs, évidemment que certains ont beaucoup plus le pouvoir de changer les choses. Je ne dis pas le contraire. Mais est-ce que l’espoir réside dans leur remplacement ?

Prenons encore une fois le climat comme exemple. Pour certains l’espoir c’est la décarbonation, le Net-Zéro, la transition énergétique. Et donc ces gens là font des politiques qui vont dans ce sens, achètent une voiture electrique, montent des boites dans les enregies renouvelable etc… Pour d’autres, ca n’est pas du tout ça, il faut faire de la décroissance économique. C’est là le seul espoir avec tout le flou qu’un sujet aussi gigantesque que celui-ci implique.

Je vais me mouiller un peu. J’ai lâché l’espoir que l’on puisse être à la hauteur de l’ambition des accords de Paris. Le climat, c’est un sujet de modèle de civilisation, et je ne vois pas du tout comment ce modèle peut être changer sans se briser tout seul, sous son propre poids. Et comme je ne vois pas, je n’y crois pas, et j’ai neutralisé mon espérance de changement de direction. On pourrait évidemment en débattre des heures et évidemment je ne vois pas tout, loin de là, mais pour l’instant j’en suis là.

Et c’est à peu près pareil pour les autres sujet évoqués, en lien avec mes peurs. Et d’ailleurs si ça me fait vraiment peur, c’est justement que je ne vois pas où pourrait être les solutions pour faire dévier ces trajectoires.

Qu’est-ce que je peux faire pour la guerre en Ukraine, pour le conflit entre Israel et les palestiniens, sur tous les enjeux géopolitiques en général alors qu’on voit bien qu’évidemment ça se tend et se complique à nouveau un peu partout. Mais d’ailleurs, qui a vraiment la main ? J’ai l’impression que tellement de choses deviennent hors de contrôle, qu’on n’anticipe plus rien ou très mal. Pareil sur l’évolution de la technologie, de l’économie, etc…

Donc globalement, ma méthode, c’est de renoncer à l’espoir sur les grands sujets mondiaux qui me dépassent totalement. Je me positionne en simple observateur, sans rien attendre. J’essaie de comprendre, de prévoir, parfois de prendre en compte tout ça dans mes choix personnels, mais c’est autre chose. Et je me dis surtout que vraiment il va nous falloir à vivre en incertitude.

Et ça ne veut pas dire ne rien faire, ne rien changer.

D’une part, je continue de croire aux émergences. Au fait quand un système complexe comme une société humaine, il peut se passer des choses inatendues. Le pire n’est jamais certain comme on dit. Donc malgré tout, il tjs un espoir en tache de fond, mais parier dessus est risqué. Ou alors il ne faut pas se tromper d’échelle, revenir à des choses sur lesquelles on a plus prise. Et encore, sur quoi a-t-on vraiment prise ? J’ai par exemple beaucoup d’espoir que mes enfants évoluent de telle ou telle manière, mais in fine, qu’est-ce qui dépend vraiment de moi. Vaste sujet.

Et mon deuxième point, et c’est plus important dans mon système personnel j’essaie de faire mienne cette extrait de la Bhagavad-Gîtâ : « Agis sans te préoccuper du résultat de ton action. »

J’en parlais avec Paul Watson en off lors de notre interview. Paul Watson pour agir pour sauver une baleine, pour être pret à mourir pour elle, n’a pas besoin d’être sur que son action va marcher. Il agit parce que c’est qui il est, qui il veut être, et à la limite peu importe le résultat, peu importe la taille de l’adversaire ou la complexité du système qu’il combat.

Si je fais ce podcast, ça n’est pas parce que j’essaie de changer les conscience, de vous influencer pour que vous pensiez de telle ou telle manière. Je ne vise aucun résultat effectif, je n’ai pas d’ambition particulière et donc d’espoir bien défini, autre peut-être que de pouvoir continuer à pouvoir le produire, pouvoir en vivre.

Je ne maitrise pas le contexte dans lequel vous écouter les conversations, je ne maitrise pas votre état d’esprit, je ne connais pas vos idées de départ et je ne sais pas comment vous allez interpréter telle ou telle mot.

Et pourtant je le fais et j’essaie de bien le faire, c’est à dire de faire quelque chose dont je puisse être fier et qui me ressemble.

Comme me l’a dit Noam Chomsky quand je l’ai intérrogé sur la question du sens : “ le sens de la vie, c’est celui que vous voulez bien lui donner”, That’s it. Qui l’on veut être. Quelle éthique veut-on se donner comme boussole, quelles valeurs ? Quels types de lien et avec qui, avec quoi ? Ca c’est du solide et ça ne dépend que de nous. Peu importe ce qui arrive dans le monde, si on clair là-dessus, que ça nous met en joie, finalement c’est assez dur d’avoir peur. On pourra mourir tranquille comme dirait l’autre.

Et c’est compliqué cette histoire de sens, c’est compliqué la condition humaine, et ça n’est pas nouveau, quelle que soit l’époque. Cette citation de Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra, « L’homme est une corde tendue entre la bête et le Surhomme, une corde au-dessus d’un abîme. Danger de franchir cet abîme, danger de se mettre en route, danger de regarder en arrière, danger d’être saisi d’effroi, danger de s’arrêter soudain. »

J’ai conscience que tout ceci sera classé par beaucoup de gens dans la catégorie “prise de tête”. En m’écoutant parler, maintenant et dans d’autres épisodes, pour être honnete je me dis parfois, “mais arrête avec tout ça”. Mange le présent à pleine dent, ne t’occupe pas du monde ou du futur, profite. Et d’autres me le disent.

Et j’oscille, en essayant de composer avec mon propre système, avec ma nature, avec mes aspirations et mes contradictions, bref, je n’ai pas réponse définitive à vous donner. comme toujours. Je ne suis pas prescripteur.

Mais pour finir je vais vous lire un petit passage de la dernière partie de mon livre sur l’action, puisque je sais qu’in fine la question se pose toujours. Qu’est-ce que je fais moi demain ou la semaine prochaine dans le contexte qui est le notre ?

Pour quoi agir.

Et je vous laisse là-dessus en vous remerciant pour votre écoute et comme toujours votre soutien.

Allez, faites vos jeux.













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